Dakar Au royaume de la cherté
Selon l’indice du « coût de vie » Dakar est l’une des villes les plus chères de l’Afrique de l’Ouest. Pour des Béninois qui posent leurs valises pour la première fois, sans information, il y a un choc tel une décharge électrique qui bousille leur portefeuille.
Aller à Dakar est un luxe. Pas de l’ordre des privilèges mais partir du Bénin pour si loin exige véritablement des dépenses. Billets d’avion pour ceux qui ont les moyens, frais de route pour ceux qui sont les moins nantis. Enseignant vacataire autrefois, Pierre a suivi les sirènes de l’espoir pour renoncer à son ancien métier et prendre les routes de l’aventure. « Pour venir à Dakar, j’ai dû vendre ma moto, mes meubles et ma parcelle. Si c’était à refaire, je n’oserai pas car toute la fortune que j’ai amenée ici, n’a pas suffi pour tenir le premier mois »
Le calvaire du loyer
Le premier choc de ceux qui quittent Cotonou pour Dakar, c’est le loyer. A surface équivalente, la location coûte 15 à 20 fois plus chère dans la capitale sénégalaise. Et pour les personnes comme les étudiants qui n’ont pris de contact qu’avec leur école avant de débarquer, c’est souvent intenable. Henriette en a fait l’amère expérience.
« Je suis arrivée à Dakar une nuit d’octobre. Heureusement que ce n’était pas la saison de la fraîcheur et j’ai dû dormir à la belle étoile. Je n’avais de contact que celui de la secrétaire de mon école qui ne passait pas. C’est le lendemain, une fois les courses pour mon inscription finies que je questionne sur les possibilités d’avoir un logis. Moi, partie de Porto-Novo où ma chambre-salon coûtait 10000, c’est avec étonnement que j’ai appris qu’il faut au moins 75 mille pour avoir une pièce, une seule ».
Chères et difficiles à trouver, les maisons. Il faut faire recours aux démarcheurs pour vous faciliter la tâche. Des individus sans foi, ni loi qui ne recherchent que du profit. Les agences légalement constituées ne louent souvent pas des chambres isolées. En plus, celles qui font exception ne satisfont pas une grande masse de demande. Ce qui laisse le champ libre aux courtiers qui ne respectent par la législation en vigueur au Sénégal. Frais de visite, payement du transport à la charge du locataire. Certains d’entre eux ont développé un côté fourbe de telle manière qu’ils présentent des maisons usagées sans aucun confort. Henriette en a payé les frais. « J’ai dormi çà et là, chez des camarades avant de trouver une chambre douche à 80 mille. Mon père m’a aidé à payer, moi qui suis partie de la maison 10 ans plutôt. Mais grande fut ma surprise après avoir intégré la maison, il m’était impossible d’y passer la nuit. La chaleur était à son paroxysme. Le lendemain, je suis allée acheter un ventilateur mais cela n’a rien changé. Je me rendis après compte que la fenêtre débouchait sur une autre maison. Il n’y avait aucune possibilité pour l’air de circuler en direction de ma chambre. » a-t-elle confié.
Au moins, cette jeune dame a pu entrer dans sa location. De nombreux Béninois ont eu à conclure des baux sans jamais pu avoir la clé de leur maison. A la signature du contrat, le bailleur ou le courtier prend juste l’engagement de réparer le matériel usagé et disparaît.
De l’or dans les assiettes
Si l’étape de logis est franchie, il faut avoir du cœur pour manger. Pierre conte son expérience. « Je suis allé à la gargote pour manger. Le plat de riz est à 1000f. Mais sérieux, ils me prennent pour un pacha ou quoi » son étonnement ira grandissant quand il se rendra au marché pour les achats. « là encore, ce n’est pas mieux, une petite boule de tomate à 200 et un piment vert à 100, pour combien il en faut pour cuisiner » s’est il étonne.
Cotonou-Nati, au prix d’un tour en ville
A Dakar, il n’y a pas de Zem. La ville a développé un réseau de transport en commun. Comparé au déplacement en Zem, il revient moins cher en rapport distance-prix. C’est un modèle de tokpa-tokpa en plus sophistiqué. Mais c’est un gouffre du temps. Pour une course qui peut prendre 20 minutes, il faut compter le temps d’attente de l’arrivée du bus, les différents arrêts, les bouchons et d’autres contraintes. Si pour gagner du temps vous osez interpeler un taxi-ville, vous en avez pour votre poche. Henriette a eu une mésaventure à ce sujet : « je savais que les taxis étaient chers. J’avais été invitée à Keur Massar, un jour de ramadan. J’ai appelé une voiture pour le trajet. Le chauffeur demande 15 mille pour me déposer. Je pense qu’avec 15 mille, j’aurai de reliquat à aller de Cotonou-Nati »
Certes vivre à Dakar a son lot de misères mais, au moins ici l’espoir n’est pas mort. Pierre et Henriette comme beaucoup de leurs compatriotes n’ont plus le goût de vivre dans leur pays d’origine le Bénin. Malgré des voyages pour essayer de s’installer définitivement à Cotonou, ils reviennent toujours.
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